Fanny Fontaine
Poétique de la dérive dans la littérature contemporaine
Laurent Mauvignier, Imre Kertész, Lin Bai
Conçue par Guy Debord comme l’outil principal pour appréhender le relief psychogéographique de la ville, la notion de dérive permet d’étudier, au sein des fictions contemporaines, l’importance de l’errance de personnages privés d’existence et donc de territoire : leur identité n’est plus fixée par un lieu, mais dissoute dans des lieux multiples ou des non-lieux.
Ainsi la littérature contemporaine, et notamment les fictions des écrivains Laurent Mauvignier, Imre Kertész et Lin Bai, parues entre les années 1990 et 2014 et appartenant à des univers géographiques, linguistiques et politiques distincts (France, Hongrie, Chine), permettent d’envisager la brisure du lien entre le sujet et son territoire comme premier symptôme d’une crise de l’identité. Cette perte du lieu invite aussi à se pencher sur les manifestations de la disparition de soi, du malaise existentiel jusqu’aux formes de dissolution fantomatique du sujet.
Enfin, parler de dérive, c’est poser la question éminente de la représentation : comment exprimer ce flottement, comment figurer la reconstruction du sujet contemporain ? En quoi la dérive constitue-t-elle une véritable poétique, une vision aquatique du monde et de la littérature ?
Introduction
I. La question du topos
Étude des relations entre le je et le dehors : une paratopie
1. Le non-lieu : de l’utopie à l’hétérotopie
Déserts ?
Le mystère
Le labyrinthe
2. L’errance
Des personnages de marcheurs
Une errance absurde
II. La perte de soi
1. L’enfermement dans le dedans
Mauvignier : l’intériorisation des perceptions du dehors
Kertész : « la cellule du je »
Lin Bai : L’immersion
2. L’extériorisation, la dissolution, le vertige
Mauvignier : Le désir d’expansion
Kertész : le décentrement
Lin Bai : la circulation cosmique, le va-et-vient entre le sujet et le monde
3. La déréalisation
L’aliénation du sujet
L’impuissance à être
4. Une mémoire éclatée
Vertige de l’oubli : les abîmes du temps
Le bios de la mémoire
III. Une esthétique de la dérive : la dérive textuelle
1. Identité, historicité, narrativité : le vacillement du sens
« Time is out of joint ». Le choc des temporalités : le montage de la mémoire
La polyphonie : le glissement des voix
L’indécision des tons et des genres : l’hybridité
La question de l’identité féminine
2. Images aquatiques : dérive en eaux profondes
Eau dormante, eau courante
Un monde flottant
Une cosmologie de l’eau
Le rêve
L’envol : une mythologie spectrale, des esprits et des fantômes. Du rêve au cauchemar ?
3. Le flot de l’écriture
Une « langue qui court »
Le flot des mots, zai wo de wenzi zhi liu 在我的文字之流
« Emporté par ma plume »
4. De la représentation à la présentation : le « montage » des images, la survivance, la chair de la mémoire
Le « pas à pas »L’image qui « cogne du dedans »
La renaissance dans la peau : l’incorporation
Conclusion
Bibliographie
Table des matières
Ancienne élève de l’ENS Lyon, docteure en littérature comparée et traductrice de poésie contemporaine chinoise – Douleurs de Zhao Lihong et Mon âme, ta porte restée entrouverte de Ruling Zhang – Fanny Fontaine a aussi collaboré à des ouvrages sur le cinéma chinois tel Alors, la Chine sur Wang Bing, et poursuit aujourd’hui une carrière d’enseignante et de critique artistique au Japon.
Découvrez aussi
Accéder aux sections